LES INFORTUNES
DU SIEUR DU CORROACH (1595)

Le jour choisi fut celui du sacre pendant qu'une partie de la garnison et De Kerservant lui même suivaient la procession.

Les gens de pied de Corroach étaient déjà arrivés à la porte du château quand ils rencontrèrent de Kerservant, ".. qui se promenaient sur le pont du château, causant avec quelques autres de la garnison, sans prendre garde à ces prétendus paysans et en passant l'un d'eux heurta, le sus-dit De Kerservant assez rudement, sans y penser toutefois, lequel se détournant vers lui, dit "qui est ce lourdaud qui me heurte ainsi?" Et prenant garde de plus près et le voyant toujours avancer dessus le pont pour entrer dedans le château, allant après demandant : "Où vas tu ? Viens-ça pataud." L'autre se détournant vers lui, lui tire un pistolet, pensant bien lui bailler dans la tête, mais le bonheur voulut qu'il ne fit que blesser au côté de la gorge, assez légèrement, duquel coup ainsi favorable le dit Kerservant tomba par terre sur le pont, et pensa-t-on qu'il fût mort.

Le soldat, qui avait nom Jean LE GUIRIEC, natif de Quimper, rue de Mescloaguen, après avoir tiré son coup de pistolet, poursuit sa route à grande course, pensant se saisir de la tour du château, mais trouvant le pont levé et ne pouvant pas retourner sur ses pas, à cause du monde qui arrivait à la file au secours, gagne la muraille, où se voyant suivi de près, n'eut pas l'avis de se jeter par desssus la courtine du château dans la douve, qui était sèche, comme firent quelques autres, et se laissa couler dedans un créneau qu'il pensait assez large, où il dévala bien jusqu'aux épaules et non plus, et demeura ainsi pendu sans pouvoir s'aider des pieds ni mains; et les soldats du château y arrivant le percèrent de plusieurs coups de hallebardes et le tuèrent... C'était un puissant jeune homme, sous vingt cinq ans, hardi, fort et courageux propre pour exécuter une telle entreprise, si le bonheur lui eût voulu..."

Un autre des hommes de Corroach nommé Christophe FER fût également fait prisonnier, échappa de peu à l'exécution et finalement retrouva la liberté moyennant une rançon de deux ou trois cents écus. Qui a payé ? L'histoire ne le dit pas !

Les cavaliers de Corroach, arrivant par le chemin de Plonéour, entendent le tintamarre et s'avancent à "... bride avalée.." pensant que l'affaire avait réussi. Mais non, c'était l'échec. Ils repartirent donc par le même chemin, tranquillement, sachant bien que la garnison du château n'était pas suffisamment nombreuse pour les poursuivre.

Kerservant fit trancher la tête de Le Guirriec déjà mort, laquelle tête fut mise sur une pique, le corps fut pendu.

Quant à Corroach, il fut poursuivit en justice par De Kerservant (après la guerre sans doute), jeté en prison préventivement à Rennes, et finalement convaincu de trahison et attentat du Pont, condamné à faire 3 années de service au Roi, à des amendes et aux dépens de sa partie.

Qu'advint-il de la jeune épouse ? Moreau n'en souffle mot. Et du manoir de Corroach, détruit par un incendie vers 1905, il ne subsiste que quelques pierres, la ferme actuelle ayant été bâtie à son emplacement.

 

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